LA MARTINIQUE

Les Antilles Françaises

MADININA : L'Ile aux fleurs

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Que dirait Colomb s'il revenait aujourd'hui en Martinique ?

Pourquoi est-il si difficile de parler de ce que l'on aime ?
Je repousse sans cesse l'échéance, mais aujourd'hui, je ne peux plus me défiler. Il va falloir que je m'y mette et que je vous parle de cette île qui me hante depuis dix-sept années.
Elle a pour moi le parfum suave du premier amour.
La première découverte faite île fut pour moi la Martinique. J'aurais pu en la découvrant écrire ceci : « C'est la meilleure, la plus fertile, la plus douce, la plus égale, la plus charmante contrée qu'il y ait au monde ».
Mais je suis présomptueuse, ces lignes ne sont pas de moi... Christophe Colomb fit cette envolée lyrique dans son journal de bord, en juin 1502.

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Et s'il revenait, aujourd'hui ? En comparant la Martinique d'aujourd'hui et celle de 1502, Colomb évaluerait-il la chance qu'il a eue alors ? Sans nul doute ! Il découvrait alors des îles d'une beauté sauvage et originelle, vierge de toute transformation humaine. Parmi elles, Madinina était, comme ses voisines, un paradis intact et authentique ! L'île aux fleurs était respectée et honorée par les indigènes. Pour eux, leur Dieu Souverain, le dieu créateur de la Nature avait établi ses quartiers au sein même des Pitons du Carbet. Ils le vénéraient tellement, qu'ils n'osaient le déranger et ne pénétraient jamais dans son domaine qui devait rester vierge. Ainsi, lorsque Colomb aborda Madinina, les tribus insulaires occupaient essentiellement le Sud de l'île, une partie de la côte au vent et quelques parcelles autour au pied du volcan. Tout le reste demeurait un territoire inviolé.

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Aujourd'hui, Colomb retrouverait tout comme autrefois une succession ininterrompue de vallons, de mornes, de montagnes et de pitons. Jusque-là, rien n'a changé, mis à part la physionomie du volcan qui, entre-temps, a bousculé le destin de l'île. Ensuite, si l'explorateur cherchait au-delà des cocoteraies, la forêt vive et exubérante qui lui barra la route autrefois, il ne la retrouverait pas intacte. De nos jours, c'est elle qui bat en retraite face à une urbanisation vorace. Il la trouverait domptée et repoussée loin au centre de l'île. La Martinique est, paraît-il, l'île des petites Antilles la plus densément peuplée. Quatre cent mille habitants se partagent 1100 kilomètres carrés. Ceci fait dire à mon capitaine : « Partout, partout des maisons, pas un morne, pas une vallée sans maison ! »

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Peut-être ? Et pourtant, la Martinique défend ses charmes. Entre l'océan et les nuages, entre la Table du Diable et le bout du bout du « Grand Nord », la Martinique étage ses panoramas : plages noires et veloutées, plages dorées et étincelantes, mangroves inextricables, lagons émeraude, savanes pétrifiées, campagnes vallonnées, champs de canne ondoyants, bocages fleuris, montagnes volcaniques, pitons aigus, forêt dense, falaises vertigineuses... Ici, la Terre parle. Elle raconte le courage d'un peuple disparu ! Dans les ruines abandonnées, les murs dévorés par les figuiers maudits témoignent des grandeurs et des souffrances d'autrefois.

Un conseil... Laissez l'Histoire aux méticuleux. Suivez plutôt les méandres de la tradition orale qui s'étayent au fil des siècles. Écoutez les légendes imagées contées au rythme du couchant dans la pénombre des cases. Partez à la découverte de la culture créole. Elle se métisse subtilement du savoir-faire des Amérindiens, des coutumes des Africains et des usages des Occidentaux.

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Je vous le dis sans embarras, la Martinique possède un je ne sais quoi qui me titille les sens à chaque visite. Je crois en être lassée et me dire :
« Cette fois c'est bon, j'en ai fait le tour ! »
Hé, non, j'y reviens toujours. Comment expliquer cet effet hypnotique ? Peut-être suis-je en phase avec sa spontanéité, sa joie de vivre explosive et son caractère trempé ? Je couve sans doute une admiration pour sa détermination et son courage face aux affres du destin ! Je m'y sens comme si j'y étais née. À son approche, je devine son parfum chaud, épicé qui m'attire à elle, sans que je puisse lutter. Et lorsque je l'aborde par Saint-Pierre, je ne peux m'empêcher de m'exclamer :
« N'est-ce pas la plus belle montagne du monde ? »
Allez comprendre cette subjectivité éhontée... Je ne m'en défends pas. Et plutôt que de vous décrire Madinina impartialement, puis-je vous livrer ici mon attachement sans fard ? Espérant qu'il soit contagieux...