Mail 48 – Avril 2006
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Zone de navigation : L’archipel guadeloupéen - Deuxième épisode

Si j’étais un oiseau de paradis, je m’installerais peut-être ici…

"Je ne sépare point l’idée de bonheur de l’idée de perfection " Lambert

Nous quittons Marie Galante a grand peine tant l’ambiance de cette île nous a ravis. Nous partons pour une petite navigation de dix-huit milles pour aller vérifier si la rade des Saintes est bien la troisième plus belle baie du monde. La première serait la baie d’Along, la seconde celle de Rio… Voici en attendant d’aller vérifier tout cela, le deuxième épisode de la trilogie sur l’archipel guadeloupéen.


Bonjour à tous,

Nous quittons à regret Marie-Galante, escale de charme par l’excellence de sa qualité de vie. Dix-huit milles nous séparent des Saintes. Nous pénétrons dans la rade légendaire aux eaux bleu outre-mer. Les Saintois s’enorgueillissent de voir leur archipel classé troisième au palmarès des plus belles baies du monde. Les guides touristiques reproduisent un cliché courant :  « la baie des saintes est la petite jumelle de la rade de Rio ! » Je n’ai jamais croisé dans les eaux brésiliennes. La comparaison est-elle exagérée ? Rendez-vous d’ici quelques années pour la réponse…

Nous parlons des Saintes au pluriel car elles regroupent 7 îles et îlots dont trois habités. Terre de Haut abrite 1500 habitants et 250 000 visiteurs par an. Terre de Bas compte 1500 habitants et une poignée de visiteurs qui grossit chaque année. Ilet Cabri accueille un Robinson pacifique, qui ne demande rien à personne…

Les Saintes tentent d’allier les contraintes d’une cité balnéaire recherchée et le charme d’un petit coin ancré dans ses coutumes séculaires. Pendant le jour, le ras-de marée des touristes s’engouffre dans la rue principale de Terre de Haut. La vague envahit les mornes et les plages. Pendant ce temps, à l’ombre des arbres, les insulaires jouent aux dominos. Les vieux loups de mer réparent leurs filets, indifférents au tumulte. Ils vivent en parallèle de l’acharnement touristique. Le soir, les hôtes ponctuels se retirent. Les scooters de location se taisent. Le soleil décline et l’authenticité réapparaît au sein de l’île. Il souffle ici comme un vent de renouveau perpétuel. Sur la place du village, en face des marches de l’église, des bancs fondus dans les hibiscus incitent à la flânerie, rafraîchie par la brise du soir.

Les insulaires de Terre-de-Haut, ne ressemblent pas du tout aux habitants des îles voisines. Les Saintois ont toujours refusé le métissage. Ils se disent les descendants directs des Bretons venus s’installer sur ces cailloux arides il y a plusieurs siècles ! Ils colportent de bouche à oreilles curieuses, des histoires de pirates et de corsaires. Comment ne pas profiter de la tombée de la nuit pour épier les habitants des Saintes? Ils sont là sur la place, ils discutent entre eux. Des éclats de voix tonitruants raisonnent jusqu’à la cime des cocotiers. Les yeux bleus de celui-ci, le teint clair à peine métissé de celui-là, les longs cheveux blonds et crépus de son voisin, la peau cuivrée de son compère, tous ces traits nous ramènent à leurs ancêtres écumeurs de mer. S’appelaient-ils Rackam le rouge, Capitaine Moëde ou Jean Laffite ? Mieux vaut poursuivre notre chemin, je sens qu’un roman n’est pas loin d’éclore…

Une promenade nous conduit sur la colline du Fort Napoléon. C’est ultra classique ! J’en conviens. Pourtant la chance, nous permet de voir quelque chose d’extraordinaire. Pendant plusieurs jours des brumes de sables ont caché la Guadeloupe. Mais au détour de la route, l’île mère se dévoile soudain. Nous admirons les pentes verdoyantes de la Soufrière. Basse-Terre sort peu à peu d’un étau de nuages. Un arc-en-ciel se love autour du sommet du volcan. Comme si le spectacle n’était pas encore à la hauteur de la beauté du site, un deuxième arc-en-ciel auréole son petit frère et la Soufrière. Nous attendons le coucher du soleil. Les rayons incendient le ciel. Le spectacle de la nature ne déçoit jamais, et celui-ci est prodigieux.

Vous commencez à connaître le Capitaine ! Dès qu’il voit une île avec des promontoires, il se régale à les gravir. Aux Saintes, il est aux anges, il s’attaque au Chameau, au Morne à Craie, à la route des crêtes, tout seul car je prétexte un retard dans mes articles pour le site… Il ramène des photographies sublimes qui me font regretter mon excès de zèle… Le lendemain, il propose d’aller à Terre de Bas, là je ne peux et ne veux plus me dérober. Nous prenons la navette qui relie les deux îles peuplées des Saintes. Nous laissons notre Etoile au mouillage de Pointe Coquelet. En effet celui-ci est le seul qui soit abrité de la houle au moment où nous y sommes, et les places sont restreintes… Un petit quart d’heure de navette et nous voici déjà à l’anse des Mûriers sur l’île voisine.

Terre de Bas, si proche, diffère en tout de Terre de Haut. Terre de Haut avait été une terre de soldats – marins – agriculteurs. Sur Terre de Bas, la canne fut introduite et avec elle des esclaves. Aujourd’hui, la population est à majorité noire ou métissée, son atmosphère est limpide et tranquille. L’île, sur le chemin d’une des destinations les plus touristiques, semble oubliée du tourisme. C’est ce qui en fait son charme. Mais la population mérite de réussire le tournant qu’elle amorce depuis peu. Le hameau de Grande Anse est soigné. Chaque maison créole est entourée d’un jardin « bo-kaz » qui agrémente autant qu’il nourrit la famille qui y vit.

Les habitants auxquels nous nous adressons sont cordiaux et souriants. L’un d’eux se moque un peu de nous. Il nous prend pour des extraterrestres à vouloir entamer une randonnée dans les traces de son île à 9 heures du matin passé. Il nous dit : « si tu parts avec le soleil, tu reviens avec le soleil… Mieux vaut partir à 5 heures de matin, là t’as pas chaud ! » Il a raison, mais nous voici quand même partis pour la trace rouge qui sera succédée par la trace bleue. A l’entrée du chemin, un tableau indique que de « bonnes chaussures sont obligatoires. » J’apporterais à ceci une nuance : en plus des bonnes chaussures, assurez-vous d’avoir des pieds en bon état, des genoux irréprochables, des articulations qui ne couinent pas et les muscles qui soulèveront le tout… Hauts les cœurs, la récompense est au bout : Une vue panoramique sur tout l’archipel et à l’arrivée, une plage de carte postale où l’on mange des spécialités locales.

Mes sens me trompent. Assise à l’ombre des palmes sur cette plage immaculée de soleil, caressée par une eau idéale, face à la « plus belle rade du monde », je surprends une pensée : « si j’avais une case là, avec une fenêtre qui donne sur cette vue là, je ne demanderais plus rien à cette planète ! » Hum, hum, hum… Combien de fois vais-je prononcer cette phrase au cours de ce périple ?

Nous finissons notre séjour aux Saintes par un arrêt à îlet Cabri. Petite île, petit mouillage surveillés par le fortin de Joséphine… Une seule personne habite l’île, un Robinson noir qui a investi un bâtiment sur la plage.

Nous empruntons le chemin désaffecté qui grimpe à l’assaut de la colline de l’île. Une large route en bitume faite pour accueillir des voitures tout terrain écarte le sous-bois. Je suppose qu’une route carrossable sur cette île lilliputienne est indispensable ? Poursuivant notre balade, un lotissement désaffecté nous donne des éléments de réponses. Les terrasses offrent une vue magnifique sur la rade des Saintes. Quel gâchis ! Les vents, les pluies érodent patiemment ce complexe touristique avorté. Combien de projets interrompus ulcèrent les paysages des îles de la Caraïbe ? Comment les entrepreneurs travaillent-ils ? Bon, j’arrête là mes questions, c’est mauvais pour l’humeur…

En passant sur la plage à proximité de « la demeure » du Robinson de îlet Cabri, je pense à son quotidien. Il vit là, loin de tout, sur son caillou. Un choix qu’il assume car, sans les rejeter, il ne cherche pas vraiment le contact avec les voyageurs de passage. Il ne possède même pas de bateau pour s’en aller voir ailleurs. Son île, hors des contraintes matérielles, lui suffit. Ce matin, des pêcheurs sont venus vider leur filet sur la plage. Ils lui ont laissé du poisson. Le soir une lueur sur la plage : il se fait un feu. Il vit là, et coule des jours simples, en retrait de la civilisation, au creux d’une des rades les plus touristiques des Antilles.

Amitiés marines
L’Etoile de Lune

Les albums photos de Marie-Galante et des Saintes vous attendent sur le site. Les Saintes renferment-elles la plus belle baie du monde ? Trouvez un élément de réponse dans le nouvel article qui lui est consacré...

Texte écrit par Nathalie Cathala et mis en page par Dominique Cathala en avril 2006


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